Rompre un christ pour sceller notre amitié

Maurice, c’était la star de notre foyer. La première fois que je l’ai vu, il m’a fait un peu peur. Gros, laid, envahissant, n’en faisant qu’à sa tête. Un monstre. Mais très vite, cette première impression a laissé la place à un attachement presque maternel. Sa manière de m’accueillir au foyer en m’aidant à décharger mes cartons, tout en regardant dedans ce que je pourrais bien avoir à lui offrir, j’en rigole encore.

Un jour de conflit, peu de temps après mon arrivée, cette attirance part en vrille. Je tiens à l’envoyer dans sa chambre, comme sanction pour un comportement agressif. Il me résiste et va jusqu’à lever une chaise menaçante. Furieux, je l’emmène alors « manu militari » dans sa chambre et claque la porte derrière moi avec une grande violence. Boum ! Maurice ressort, hagard, avec à la main un gros crucifix qui vient de tomber du mur. Le Christ en plâtre est en morceaux. Ca a l’effet de nous calmer tous les deux d’un coup. Il me confie la réparation de l’objet, à laquelle je m’emploie derechef, enfermé dans le bureau. De ce jour, nous n’avons plus jamais eu un tel conflit.

Il nous a fallu rompre un Christ pour sceller notre amitié.

#ALM027